COMMENT CHARLOTTE LEMAY A TRANSFORMÉ SON INFLUENCE EN LEVIER ÉCOLOGIQUE
Charlotte Lemay, mannequin et créatrice de contenus française, s’est imposée ces dernières années comme une figure de l’influence « responsable ». Sous le pseudonyme Chamellow, elle compte plus de 250 000 followers sur Instagram , où elle mêle mode, esthétique, mais aussi engagements écologiques et éthiques, à rebours des codes de la fast fashion. Son parcours n’est pas celui de la perfection revendiquée, mais plutôt d’une transformation cohérente, visible, fondée sur la transparence, le refus du greenwashing, et un désir d’impact tangible. Grâce à l’association qu’elle a fondée, Aware Collective, à son livre Influenceur·se engagé·e (co-écrit avec sa sœur Camille, édité chez Jouvence en 2024) et à ses prises de parole publiques, elle trace une voie stratégique pour les marques comme pour les influenceurs souhaitant concilier visibilité et responsabilité.
Cet article décortique la stratégie déployée, le positionnement story-telling, les résultats / les chiffres disponibles, les mécaniques marketing/influence, pour proposer une grille de lecture de ce que révèle son influence sur le marché, et ce que les marques peuvent en apprendre.
EXPLORER LA STRATÉGIE DE CHARLOTTE LEMAY : COHÉRENCE, CHOIX, ACTION
Le positionnement : authenticité, responsabilité, esthétique désirable
Charlotte Lemay ne s’est pas contentée d’ajouter un discours écologique à une carrière de mannequin. Depuis ses débuts (mannequin depuis l’âge de 17 ans) , elle a vu s’amorcer un décalage entre son métier – souvent synonyme d’avions, de fast-fashion, de shooting dans des conditions peu transparentes – et ses convictions personnelles. Ce “déclic” poussant à l’alerte écologique, aux questionnements sur les marques, les matériaux, les moyens de transport, etc., constitue le cœur de son positionnement.
Son storytelling est construit autour de la transition : d’abord le constat, puis les choix concrets testés et montrés, les erreurs, les compromis. Charlotte ne revendique pas la pureté mais l’effort, la nuance – ce qui la rend plus crédible auprès d’un public jeune souvent méfiant du “vert parfait”.
Les actions concrètes : associations, refuser, éduquer
Elle a fondé Aware Collective : une structure qui organise des voyages en train (en France), des journées de sensibilisation pour influenceurs/créateurs de contenu, afin de promouvoir des savoir-faire locaux, éthiques, responsables.
Elle refuse certaines collaborations (marques non responsables, besoin de voyager en avion quand ce n’est pas justifié) : ces choix impliquent des pertes potentielles de contrats, mais renforcent sa crédibilité.
Publication d’un livre « Influenceur·se engagé·e » (2024, Jouvence), avec sa sœur Camille : cela permet de formaliser ses convictions, ses enseignements, ses guides pour agir.
LE DISPOSITIF DIGITAL / INFLUENCE ET LES CHIFFRES
Portée, engagement, communauté
Sur Instagram, ~250 000 abonnés sur le compte @chamellow ; compte actif et suivi pour ses contenus lifestyle, mode, mais surtout pour ses partages de pratiques écoresponsables.
Elle dépasse 220 000 abonnés selon certaines sources récentes dans des interviews / podcasts.
Ses publications mêlent esthétique, lifestyle, mais aussi témoignages, appels à la réflexion, guides pratiques. Le format “podcast”, “livre”, “atelier” vient compléter le contenu visuel. Par exemple, elle participe à des épisodes de podcast / radios (AirZen, Métamorphose) pour parler d’écologie désirable, d’influence responsable, d’équilibre vie réelle / vie en ligne.
Médias / collaborations / influence élargie
Ambassadrice pour des projets comme Voice for Good ou No More Plastic
Son action auprès de Make the Label Count : prise de parole au Parlement européen au printemps 2025 sur la prise en compte des services écologiques rendus par les matières naturelles dans les évaluations environnementales de l’UE.
LES RÉSULTATS ET LE CONTEXTE MARCHÉ : EFFICACITÉ, LIMITES, TENDANCES
Mesurer l’impact : visibilité + crédibilité
En termes de visibilité, le compte Instagram sert d’amplificateur : le mélange mode, esthétique, vie personnelle + engagement permet de toucher aussi bien les personnes intéressées par la mode que celles plus sensibles à l’écologie. Le format visuel aide beaucoup : photographies, voyages, looks etc.
En termes de crédibilité : ses choix de refus, ses collaborations limitées, sa transparence sur les doutes et les compromis lui donnent une légitimité supérieure à beaucoup d’influenceurs lifestyle qui se convertissent tard ou superficiellement.
Limites, coûts et paradoxes
Il y a un coût : financier (refuser certains jobs), temps (recherche, vérification, éducation personnelle), critique publique (on attend souvent la “pureté”). Charlotte le reconnait.
Le secteur de la mode reste très polluant et peu transformé encore ; beaucoup d’acteurs continuent à faire du greenwashing ou de la communication superficielle. L’impact réel (en termes de pollution évitée, conditions de travail améliorées, matériaux durables massifiés) reste dépendant de la capacité du marché à changer au-delà des influenceurs.
Ce que cela révèle du marché
On voit une demande publique croissante pour une influence plus responsable : les jeunes générations réclament des marqueurs éthiques forts, veulent moins de “post Instagram superficiel”, plus de valeurs, plus de transparence. Charlotte Lemay surfe sur cette évolution.
Les formats hybrides (livre, podcast, association) deviennent indispensables pour ceux qui veulent dépasser le simple post ou le reel : c’est le signe que l’influence ne suffit plus seule, il faut multiplier les canaux pour éduquer, convaincre, construire de la confiance.
Le marché de la mode et du lifestyle est forcé de se réinterroger : matériaux, sourcing, transport, transparence des prix. Des figures comme Charlotte poussent ce mouvement de l’intérieur.
REGARD BRAND ZONE : CE QU’IL FAUT RETENIR, LES ENSEIGNEMENTS, LES TENDANCES
Charlotte Lemay illustre parfaitement ce que l’on pourrait appeler l’influence militante soft : elle n’est pas dans le manifeste agressif, mais dans le choix durable, l’alignement des actes et la narration transparente. Ce type d’influence, moins spectaculaire mais plus crédible, semble gagner du terrain.
Les marques qui veulent s’associer à ce profil doivent être prêtes à s’engager réellement : matériaux, conditions de fabrication, transport, etc. Elles ne peuvent plus se contenter de claims vagues ou d’images “vertes” superficielles. Sinon, le risque de critique forte – ou d’incrédulité – est grand.
Pour les influenceurs / créateurs de contenus, le parcours de Charlotte Lemay montre qu’il y a une voie viable entre visibilité et sens : refuser certains contrats, accepter de perdre à court terme, mais gagner en voix, crédibilité, durabilité. Le public, lui, semble prêt à suivre une figure qui assume ses contradictions, mais agit.
Cette influence écoresponsable, désirable et pratique, soulève plusieurs tendances :
L’importance de la transparence (origine des produits, impact, compromis) pour crédibiliser le discours.
Le besoin de formats longs / pédagogiques : livres, podcasts, actions concrètes.
Une exigence accrue des audiences envers les marques et les figures publiques pour dépasser le greenwashing.
Le glissement vers une influence “utile”, non seulement esthétique, mais porteuse d’actions tangibles, de plaidoyer.
Charlotte Lemay ne change pas seulement son image ou son contenu ; elle contribue à redéfinir ce que peut être l’influence au 21ᵉ siècle. Pour les marques, c’est un signal fort : l’audience attend l’alignement, pas seulement le discours. Pour le secteur, c’est un levier, mais encore embryonnaire — le passage à l’échelle reste le défi.
Un article écrit par Benoît Dessaux, le 17 septembre 2025